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Canal synthétique de la IIème Internationale Situationniste Immédiatiste.

samedi 7 mai 2011

Les problèmes comme creusement d'authenticité dans l'Âge de fer .



(1942: Hubert Furtwangler, Hans Scholl, Willi Graf, unknown, Sophie Scholl and Alexander Schmorell before leaving for service on the Russian front - http://www.dailymail.co.uk)


Si nous osions allumer le feu...


Un désir d'action qui ne commencerait pas par une réflexion sur l'action n'est pas une action juste . Et réfléchir, c'est déjà agir . Il est caractéristique que dans l'idéologie racine, on considère que la réflexion est étrangère à l'action . On attaque la Lybie, et après on se demande pour quelles fins, comment les mettre en place, et avec quels moyens – et quel sera l'impact des moyens sur les fins ? On attaque la Lybie, on fait le matamore sur la vengeance contre les méchants, et on se retrouve avec des enfants écrasés sous les décombres des bombardements . Les hommes qui ont ordonné cette attaque ont tué des enfants, aussi sûrement que s'ils les avaient mis dans un sac pour les noyer comme des chats – et ce sang rejaillira sur eux, et sur nous, qui laissons faire .


Trois petits-enfants du méchant, certes . Que fait-on des enfants ? Devons nous accepter les formes de pensée qui conduisent à les compter comme de trop, à accepter leur mort ? Je dis sans hésiter : non, il n'existe aucune obligation de compter des hommes comme étant de trop . J'ai entendu ces mots : chaque être a sa place, et elle lui est parfaite – telle est la maxime de l'ordre .


Avec de grands cris, face à la situation lybienne, alors même que notre propre société est creusée par une injustice flagrante, alors même que depuis quarante ans les européens s'accommodent de Khadafi, alors même que celui-ci a été reçu avec honneur par notre pays, il devient un tyran insupportable qu'il faut détruire en bombardant un pays de centaines de charges explosives ? Et les mêmes qui défendaient l'injustice hier seraient devenus détenteurs de la Justice ?


Que savons nous réellement de la Lybie ?


Je prends un exemple . Mais ces questions préalables, combien faut-il les poser davantage quand il s'agit d'abattre la société industrielle . Cette société a des siècles d'existence, une puissance écrasante, et a triomphé d'innombrables oppositions . Elle secrète une idéologie qui infecte peut être plus encore ses ennemis que ses défenseurs, rendant leurs actions d'avance assimilables par le Système . Ceux qui font mine de croire que des pétitions et des manifestations spectaculaires vont transformer le Système peuvent continuer, mais le préalable de la réflexion sur l'action demeure – et encore une fois : LA REFLEXION EST ACTION .


C'est la fiction morale qui est inaction . Dire comment le monde doit être à partir de ses catégories morales, c'est de la fiction impuissante ; s'écarter des gesticulations du spectacle pour chercher comment miner le Système, c'est agir réellement . Il n'est pas certain qu'habiter des oasis rendant la vie moderne vivable soit refuser d'agir, et manifester à Gênes agir ; il est possible que le fait de quitter le Système soit une action significative, et qu'aucune forme de terrorisme ou d'action de sabotage ne soit une action significative, au contraire des doutes de Bernard Aspe . L'arrogance occidentale, liée à la puissance technique du Système, fait que dans la pensée commune, une action est déterminée quand les fins sont déterminées – et le reste est un travail technique d'ingénieurs . La fin est que chaque citoyen jouisse du maximum de libertés de déplacement – et les moyens de déplacement sont un problème d'ingénieurs . La fin est que la Libye devienne comme nous – et les moyens sont un problème d'ingénieurs militaires . La fin est que nous ayons de l'électricité – et les moyens, les centrales nucléaires, sont un problème d'ingénieur .


Je crois que c'est Clémenceau qui a dit : la guerre est une chose beaucoup trop sérieuse pour la laisser aux militaires . Eisenhower lui même avait averti de la puissance excessive du lobby militaro-industriel, qui risquait de déterminer la politique extérieure des États Unis pour déployer ses systèmes d'armes . La vérité, c'est que de plus en plus dans le Système, le déploiement des moyens détermine les fins, comme dans la promotion du chauffage électrique en France, pour absorber l'excédent d'électricité nucléaire . La première guerre mondiale s'est commencée sur un mécanisme de fer, parce que le déploiement des moyens militaires ne pouvait plus être stoppé après un certain seuil, sans désorganiser tout déploiement ultérieur à court terme . La délégation des moyens à la technique, ce n'est rien d'autre que la certitude d'aller toujours dans le sens du déploiement de la puissance matérielle maximale – ou encore, la certitude de rester dans le Système, et même de soutenir le Système . Tel fut le rôle ambigu de Ben Laden, qui fut réalisé par J.P Manchette : le terrorisme et la terreur d'État sont les deux mâchoires du même piège à cons .


Il n'est que trop facile, dans l'idéologie racine qui codifie l'action comme comportement visible, donc comme Spectacle, de prêcher la rupture du maillon de la réflexion . Le Spectacle ne cesse de montrer des gesticulations comme étant des actions . Pour le Spectacle, être photographié sur le lieu d'une catastrophe est agir, surtout si l'on porte un objet à donner ou un outil . A Haïti, au lendemain du tremblement de terre, les avions transportant du matériel de secours passaient en second après les avions des personnalités officielles . Être photographié dans une manifestation, crier, est agir . Le Spectacle aime les belles jeunes filles qui portent des drapeaux juchées sur le dos de leurs camarades, en manifestations – et il se trouvent toujours des gens pour reproduire le comportement suggéré . Un magnifique spectacle ; après on peut rentrer chez soi, se revoir à la télé, ou faire circuler les infos ou les photos . Et puis, et puis après ?


Agir contre le Système...c'est à la fois juger que le Système a des problèmes, est un problème, et vouloir lui créer des problèmes insurmontables, c'est à dire inassimilables . Mais qu'est ce qu'un problème, comment identifier un problème dans un Système aussi complexe et créateur d'illusions ?


Je commence donc ce travail par une réflexion sur la notion de problème .



***



Tout commence par l'idée que certains faits posent problème, sont des plaies, d'anciennes blessures qui ne peuvent se refermer dans l'idéologie racine, et donc que cette idéologie ne peut pas se clore – que notre œuvre et de creuser, creuser les plaies du Système – pour hâter son agonie .


Et aussi par ce constat que le monde moderne se pose toute sorte de problèmes, qui paraissent des fruits du Spectacle et être sans fondement vivant . Le monde moderne n'aborde pas sérieusement des problèmes qui mettent en jeu la vie des hommes à terme . Par exemple, le problème de la parité est mis en avant, et le problème de Fukushima disparaît dans le silence . Autant vous dire que dans la Florence du Decameron, ravagée par la Peste, il est toute sortes de problèmes qui ne se posent plus . Vivre avec puissance, avec intensité, est le seul problème essentiel de la vie .


Qu'est ce qu'un problème ? Un problème n'est pas une chose qui puisse être saisie . Un problème est une entité relationnelle – quelqu'un a un problème . Le mot problème désigne une situation de la relation entre une conscience et son monde – un arrêt de la relation . Un arrêt dans la construction du monde collectif – un problème est aussi un fait de communication, même si le problème n'est pas un problème de communication . Les problèmes de la vie, les problèmes de l'existence, voilà une part du lot des hommes . Nous avons des problèmes, des problèmes à résoudre . Nous disons qu'un problème se résout, se règle, se clôt . Pourquoi un fait, une situation, une phrase posent-ils un problème ?


Je veux aborder un aspect de la réponse, aspect qui est peut être général . Un problème n'est pas un fait ou un énoncé isolé . Un problème est l'ensemble d'une situation ET l'index qui pointe un aspect de la situation comme étant LE problème . C'est une approche analytique et technique du monde, appropriée si par exemple le problème est d'être en panne de voiture sur l'autoroute . Un mécanicien exécute des procédures permettant, par élimination progressive des causes de la panne, d'identifier LE problème . Cette position de problème véhicule l'hypothèse implicite que TOUT est fonctionnel, en dehors d'un élément isolé pathologique . Elle est fonctionnelle dans l'idéologie racine, qui construit le monde comme fonctionnel au Système, analogiquement à la construction de l'homme comme mesure du monde .


Mais l'application de cette approche au monde – en général à toute situation complexe, multicausale- est très simpliste . Par exemple : la situation globale du monde arabe relève d'un tissu d'incompréhensions, d'injustices et d'oppressions, qui conduit à des spasmes collectifs – attentats, révolutions, guerres civiles, dictatures – et quelqu'un pose telle personne ou telle organisation comme étant LE problème . Voyez, un combattant est mort, et il n'y aurait plus de problèmes . Autre exemple : la civilisation industrielle est fondamentalement instable, et Marx dit que LE problème est la lutte des classes .


Le problème donc, c'est que les situations du monde réel sont pour la plupart très complexes, et que pointer UN problème est analogue à la situation des familles pathologiques, qui font reposer leur problème global – être un ordre étouffant et injuste, basé sur un socle de silences et de mensonges – sur Un membre, de préférence celui qui ne peut pas se défendre . Le même procédé se retrouve dans les récits simplistes binaires, du type James Bond, ou encore dans le processus de bouc émissaire, dont je ne fait pas le modèle général du monde ou de la psyché . Je sais par expérience que celui à qui on fait jouer le rôle du méchant peut devenir méchant, réellement .


Un problème est une construction dans le contexte général d'une situation . Les énoncés qui décrivent le problème orientent déjà vers l'index du problème . L'importance stratégique de l'idéologie est là : elle décrit la situation, et déroule la situation naturellement vers un index du problème qui convient au Système dominant . J'appelle l'ensemble des énoncés descriptifs, et l'index qui leur correspond, les termes du problème .


***


La construction collective des problèmes est un point fondamental . Longtemps, la Loi a été le modèle de la construction des termes des principaux problèmes .


La première question de la communication est l'identification et l'établissement des termes d'un problème entre plusieurs personnes – la Cité et la Loi est en quelque sorte le terme du problème global de l'existence multiple des hommes . Par la Souveraineté, la Cité, la Loi, les hommes ont puissance de définir leurs rôles propres, de vivre en harmonie, et de s'élever ensemble vers l'analogie de la Terre Promise . Un exemple :


"La famille manifeste les lois qui règnent à l'intérieur de la maison, lois qui, appliquées au monde extérieur, maintiennent également en ordre la cité et l'univers. (...) Quand le père est vraiment père et le fils vraiment fils, quand le frère aîné tient comme il faut sa place de frère aîné et le cadet celle de cadet, quand l'époux est vraiment époux et l'épouse vraiment épouse, alors la famille est en ordre. Lorsque la famille est en ordre, toutes les relations sociales de l'humanité s'ordonnent à leur tour.

Yi King ,37, la famille.


Une première remarque s'impose . La Loi ainsi présentée permet de pointer le problème quand la Cité et l'Univers sont en désordre . Mais elle offre peu de portes de sortie au désordre . Car si le père n'est pas vraiment père, par exemple, et que le fils se lève pour le lui dire, lui-même n'est pas vraiment fils . Si même une personne extérieure intervient pour le dire dans la famille, cette personne n'est-elle pas complètement en dehors de son rôle naturel ? - De ce fait, quand un ordre ne fonctionne pas, qu'une personne qui doit y jouer un rôle subordonné le sache, et même puisse en exposer les causes, n'est pas une aide – car son savoir est un savoir de souveraineté, ce qu'elle n'a pas . Si cette personne exerce la souveraineté, c'est une révolution, non une réparation . Ainsi Dante a -t-il été tout à fait hors de capacité de restaurer un ordre dans la Chrétienté, après avoir écrit De Monarchia . La solution des problèmes collectifs est de l'ordre de la souveraineté effective .


L'action qui reste à la portée de celui qui possède le savoir de Souveraineté, et non la souveraineté effective – situation anormale normale au présent cycle – est le Wu Wei, le non agir, ou encore le Satyagraha de Gandhi, le « se tenir dans la Vérité » - car il semble que tout autre action ne puisse qu'ajouter de la confusion à la confusion .


Au présent cycle, la situation de la Loi est très dégradée, et l'idée même de Cité est niée : il n'existe rien de tel que la société, a proclamé Margaret Thatcher, exprimant l'idéologie globale du Système à la suite de la société du Mont Pèlerin .


Il existe pourtant une question de souveraineté dans l'index du problème, et dans les termes du problème à l'âge moderne . Si dans la société je n'ai pas de quoi vivre, mon problème est le manque d'argent, le chômage ou ma paresse personnelle si j'accepte les termes du problème tels qu'ils sont imposés par l'ordre, ou par les puissants ; mon problème est le manque de décision, de détermination et d'habileté si je suis un voleur dans une société de voleurs .


La loi souveraine est la référence des termes des problèmes dans un État de droit – c'est à dire que des textes désintéressés, actés par des gens non-impliqués dans les problèmes, leur procurent des solutions selon des normes censées êtres reconnues par tous . Pour ce qui concerne le manque d'argent, la possibilité du vol devient ainsi un terme du problème du manque personnel d'argent illégitime, et l'effort au service de la Cité un terme légitime .


La question des termes du problème crée aussi une hiérarchisation des problèmes, soit légale, soit basée sur la force . Si la Loi règne, l'ordre légal et son maintien sera globalement prioritaire sur les problèmes personnels, mais il restera toujours le cas d'exception . Mais cette situation n'est pas la situation présente . Si la Loi est abaissée, comme aujourd'hui, les termes du plus puissant sont hiérarchisés comme prioritaires sur ceux du dominé . Par exemple, dans le métro, si je n'ai pas de ticket ni d'argent et que je suis loin de chez moi, c'est un problème sérieux qui vaut bien de tenter une fraude ; mais si je suis seul face à un groupe de contrôleurs, c'est mon absence de titre de transport qui est le problème le plus grave – car les contrôleurs ne nieront pas mon problème, enfin pas nécessairement . Ils invoqueront la Loi, mais je saurais aussi que si j'étais assez puissant, je pourrais contourner cette obligation légale . En clair, dans une société saine, un homme pauvre qui commet un excès de vitesse pour mener une accouchée à l'hôpital n'aurait pas d'amende, les gens d'armes appliquant le cas d'exception, et un homme riche qui commet un excès de vitesse sans raison valable se ferait un devoir d'obéir, respectueux d'un ordre qui le favorise, et du souverain qui a fait la Loi . Dans la société moderne, l'homme pauvre devra payer le reçu du radar automatique, et l'homme riche pourra en annuler sinon le montant, faible pour lui, mais au moins les effets .


De manière habituelle, dans l'idéologie libérale, on attend des individus qu'ils priorisent leurs problèmes contre ceux de la société représentée par la Loi, et donc qu'ils fraudent, et qu'ils ne respectent pas les lois . Il faut donc des dispositifs de contrôle extérieurs qui les y oblige, tandis que la conscience individuelle est formatée sans véritable limite morale . Notre modèle idéologique crée une société prioritairement répressive, avec une répression graduée de la plus forte en bas de l'échelle sociale au plus faible, voir nulle, au sommet . Il y a aussi des ruptures de graduation, puisque la répression hygiénique, par exemple, ne suit pas cette courbe – le pauvre peut se baffrer salement de junk-food . L'idéologie racine croit au radar automatique, à la télésurveillance, aux barrières infranchissables, aux murs, aux papiers infalsifiables – pas à l'éducation, à l'autonomie, à la responsabilité, à la loyauté et à la confiance . Pourtant, la moindre tribu sauvage s'organise souvent sur ces simples principes, et pas si mal .


Enfin, toujours dans l'idéologie racine, qui au fond est contradictoire avec l'idée de Loi, la hiérarchisation des problèmes est posée comme purement subjective, individuelle, et livrée à l'arbitraire de la puissance . Si je fais partie d'un groupe de trente hommes menaçants dans le métro, l'absence de titre de transport n'est plus un problème face à un contrôleur isolé, quoi . De ce fait, même l'application de la loi devient injuste, arbitraire, réservée aux faibles – voyez le cas de l'impôt et des « niches fiscales » . En vérité, comme chaque individu est posé dans l'idéologie racine comme potentiellement tout puissant, désirant l'expansion maximale de sa puissance matérielle (donc d'une puissance à somme finie), il s'ensuit que chaque individu est potentiellement en guerre contre tous les autres, et qu'il ne peut y avoir qu'une indéfinité de problèmes à régler, ce qui explique et justifie l'inflation judiciaire, et le poids des avocats dans les pays les plus libéraux .


La Loi devient un des biens de la négociation universelle de tous avec tous – la possibilité d'obliger à la respecter, et la puissance de lever cette obligation devenant un bien échangeable dans la construction d'un réseau, pour les policiers, les juges, les avocats . C'est ce qui est nommé la corruption, mais qui pourtant est un fait aussi évident que reconnu . L'homme puissant fonctionne sur le mode non pas de l'autorisé et de l'interdit, sur le mode de la Loi, mais sur le mode du possible et de l'impossible, en fonction de la situation actuelle de sa puissance . Par exemple, la consommation de drogue est banalisée dans certains milieux de puissance, sans risques véritables de peine . Par exemple, l'usage d'armes, le mensonge systématique, la terreur, le meurtre deviennent droit d'ingérence, communication responsable et progrès de la démocratie quand je dispose de la puissance médiatique pour décrire mes actes, et terrorisme, lavage de cerveau, atrocités inhumaines quand je décris les actes de l'adversaire .


Au delà de la Loi, c'est la vérité même qui devient, dans le Sous-Système médiatique, un bien échangeable . Il devient normal de ne décrire de situations que relativement au groupe d'intérêt dont on fait partie, de ne poser de termes de problèmes que relativement à des perspectives partisanes . Et ce sont ces adultes là qui vont expliquer ensuite doctement ce que sont les attentes de la société envers l'école en matière de formation de l'esprit critique, avant de revoir avec leurs collaborateurs leurs plans de communication et de storytelling manipulatoire à l'approche des élections .


Sans Loi authentique et sans liberté, la société « démocratique » moderne est aussi cruelle au faible et au pauvre que la société condamnée par les prophètes d'Israël . Quand le puissant du jour parle avec des larmes dans la voix de confiance ou de respect de la Loi, ou quand il confesse publiquement un mensonge, ou quand les adversaires d'un puissant instrumentalisent au profit de leur propagande les mensonges de ce dernier, tout en étant prêt à tout pour l'abattre, il ne fait que s'ajouter du mensonge sur du mensonge – le mensonge est triomphant en leurrant le désir de vérité de tant de gens modestes . Mais cela est une autre question .


Le problème de ce fait le plus cruel de notre âge est celui d'une société humaine organisée en niant sciemment la Justice et la Vérité . Ce fait est rarement exposé au grand jour, il est pourtant secrété par le Système et l'idéologie racine comme la canne secrète le sucre .


De ce fait, les problèmes qui menacent le monde ne seront pris en charge que quand ils seront urgents, et jamais sans que s'y adjoignent une infinité de problèmes secondaires . Dit autrement, la structuration libérale de la société la rend, et volontairement, foncièrement incapable d'affronter des problèmes collectifs de grande ampleur, et incapable de fonder le collectif qui permettra la solidarité des hommes . Au niveau des représentations, la régression idéologique domine, avec le succès mondial des théories du complot, ou le retour à un nationalisme primaire . Le cas du Japon est significatif : il n'existe ni vision partagée valide, ni savoir du rôle de chacun enraciné dans le temps et la vérité du danger, et régression à des théories fantasmatiques . Les informations les plus contradictoires circulent, les hommes démissionnent ou mentent, le déni est général . Mais le Japon est encore une image de l'état de la France de 1940, entre désunion, aveuglement, lâcheté...


Quel De Gaulle pourra se lever et dire :

Les chefs qui, depuis de nombreuses années, sont à la tête des armées françaises, ont formé un gouvernement. Ce gouvernement, alléguant la défaite de nos armées, s’est mis en rapport avec l’ennemi pour cesser le combat.


Ne pourrait-on pas paraphraser pour tant de dirigeants qui voulaient sortir du Système, et prêchent maintenant que c'est impossible ?

Certes, nous avons été, nous sommes, submergés par la force mécanique, terrestre et aérienne, de l’ennemi.


Mais le dernier mot est-il dit ? L’espérance doit-elle disparaître ? La défaite est-elle définitive ? Non !


Croyez-moi, moi qui vous parle en connaissance de cause et vous dis que rien n’est perdu...


Cette guerre n’est pas limitée au territoire malheureux de notre pays. Cette guerre n’est pas tranchée par la bataille de France. Cette guerre est une guerre mondiale. Toutes les fautes, tous les retards, toutes les souffrances, n’empêchent pas qu’il y a, dans l’univers, tous les moyens nécessaires pour écraser un jour nos ennemis. Foudroyés aujourd’hui par la force mécanique, nous pourrons vaincre dans l’avenir par une force mécanique supérieure. Le destin du monde est là.


Bien sûr, la force mécanique ne peut foudroyer la force mécanique, mais toutes les visions partielles, locales de la guerre en cours ne doivent pas cacher que le monde entier est submergé par le Système, et que le sort du Système se joue à l'échelle du monde .


Moi, Général de Gaulle, actuellement à Londres, j’invite les officiers et les soldats français qui se trouvent en territoire britannique ou qui viendraient à s’y trouver, avec leurs armes ou sans leurs armes, j’invite les ingénieurs et les ouvriers spécialistes des industries d’armement qui se trouvent en territoire britannique ou qui viendraient à s’y trouver, à se mettre en rapport avec moi.


Il donne une direction, une direction concrète d'action, il redonne vie à l'extrême de la défaite . Et cela nous manque tellement !


Quoi qu’il arrive, la flamme de la résistance ne doit pas s’éteindre et ne s’éteindra pas.


Quel Churchill peut se lever et dire : je ne peux vous promettre que du sang, de la sueur et des larmes ?


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