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Canal synthétique de la IIème Internationale Situationniste Immédiatiste.

mercredi 12 juin 2013

Le bloom comme producteur et comme consommateur idéologique.

(Tiens, c'est nouveau, cela. Marina Abramovic)

Marx, idéologie Allemande : 
« (...)

« Jusqu'à présent les hommes se sont toujours fait des idées fausses sur eux-mêmes, sur ce qu'ils sont ou devraient être. Ils ont organisé leurs rapports en fonction des représentations qu'ils se faisaient de Dieu, de l'homme normal, etc. Ces produits de leur cerveau ont grandi jusqu'à les dominer de toute leur hauteur. Créateurs, ils se sont inclinés devant leurs propres créations. Libérons-les donc des chimères, des idées, des dogmes, des êtres imaginaires sous le joug desquels ils s'étiolent. Révoltons-nous contre la domination de ces idées. Apprenons aux hommes à échanger ces illusions contre des pensées correspondant à l'essence de l'homme, dit l'un, à avoir envers elles une attitude critique, dit l'autre, à se les sortir du crâne, dit le troisième et — la réalité actuelle s'effondrera. »

Ces rêves innocents et puérils forment le noyau de la philosophie actuelle des Jeunes-Hégéliens, qui, en Allemagne, n'est pas seulement accueillie par le public avec un respect mêlé d'effroi, mais est présentée par les héros philosophiques eux-mêmes avec la conviction solennelle que ces idées d'une virulence criminelle constituent pour le monde un danger révolutionnaire. Le premier tome de cet ouvrage se propose de démasquer ces moutons qui se prennent et qu'on prend pour des loups, de montrer que leurs bêlements ne font que répéter dans un langage philosophique les représentations des bourgeois allemands et que les fanfaronnades de ces commentateurs philosophiques ne font que refléter la dérisoire pauvreté de la réalité allemande. Il se propose de ridiculiser ce combat philosophique contre l'ombre de la réalité, qui convient à la somnolence habitée de rêves où se complaît le peuple allemand, et de lui ôter tout crédit.

Naguère un brave homme s'imaginait que, si les hommes se noyaient, c'est uniquement parce qu'ils étaient possédés par l'idée de la pesanteur. Qu'ils s'ôtent de la tête cette représentation, par exemple, en déclarant que c'était là une représentation religieuse, superstitieuse, et les voilà désormais à l'abri de tout risque de noyade. Sa vie durant il lutta contre cette illusion de la pesanteur dont toutes les statistiques lui montraient, par des preuves nombreuses et répétées, les conséquences pernicieuses. Ce brave homme, c'était le type même des philosophes révolutionnaires allemands modernes . »

***

Ces premières lignes de l'idéologie allemande de Marx semblent parler de notre monde, par exemple des Gender Studies, sans parler de toutes les autres conneries de professeurs et de curés laïques diffusées en vrac sur les réseaux :

Jusqu'à présent les hommes se sont toujours fait des idées fausses sur eux-mêmes, sur ce qu'ils sont ou devraient être. Ils ont organisé leurs rapports de genre en fonction des représentations qu'ils se faisaient de Dieu, de l'homme normal, des genres, etc. Ces produits de leur cerveau ont grandi jusqu'à les dominer de toute leur hauteur. Créateurs, ils se sont inclinés devant leurs propres créations. Libérons-les donc des chimères, des idées, des dogmes, des êtres imaginaires sous le joug desquels ils s'étiolent. Révoltons-nous contre la domination de ces idées, révoltons nous contre le patriarcat. Apprenons aux hommes à échanger ces illusions contre des pensées correspondant à l'essence de l'homme, dit l'un, à avoir envers elles une attitude critique, dit l'autre, à se les sortir du crâne, dit le troisième et — la réalité actuelle patriarcale s'effondrera.(...)

Naguère une brave femen fort riche s'imaginait que, si les hommes et les femmes ne se comportaient pas identiquement, c'est uniquement parce qu'ils étaient possédés par l'idée de genre inculquée par le patriarcat. Qu'ils s'ôtent de la tête cette représentation, par exemple, en déclarant que c'était là une représentation religieuse, superstitieuse, et les voilà désormais à l'abri de tout risque de différence de genre et promis éternellement à une égalité des sexes sans conflit. Sa vie durant elle lutta seins nus contre cette illusion des genres dont toutes les statistiques lui montraient, par des preuves nombreuses et répétées, les conséquences pernicieuses. Cette brave femme, c'était le type même des philosophes révolutionnaires européens modernes .

Ce qui est bien à noter : Marx reste intemporel à l'intérieur du présent cycle du règne capitaliste.

Ce qui fait de la peine : l'idéologie de base de la société capitaliste moderne est identique en 1850 et 2013 ; il est très probable qu'elle le soit encore en 2050.

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La nouveauté...C'est un texte très ancien qui en a parlé autrefois :

Paroles de Kohélet, fils de David, roi à Jérusalem. 2 Vanité des vanités, a dit Kohélet, vanité des vanités; tout est vanité! 3 Quel profit tire l'homme de tout le mal qu'il se donne sous le soleil? 4 Une génération s'en va, une autre génération lui succède, et la terre subsiste perpétuellement. 5 Le soleil se lève, le soleil se couche: il se hâte vers son point de départ, où il se lèvera encore, 6 pour s'avancer vers le sud et décrire sa courbe vers le nord; le vent progresse en évoluant toujours et repasse par les mêmes circuits. 7 Tous les fleuves vont à la mer, et la mer n'en est pas remplie; vers l'endroit qui est assigné aux fleuves, ils dirigent invariablement leur cours. 8 Toutes choses sont toujours en mouvement; personne n'est capable d'en rendre compte. L'œil n'en a jamais assez de voir, ni l'oreille ne se lasse pas d'entendre. 9 Ce qui a été c'est ce qui sera; ce qui s'est fait, c'est ce qui se fera: il n'y a rien de nouveau sous le soleil! 10 Il est telle chose dont on dirait volontiers: "Voyez, ceci est nouveau" Eh bien! Cette chose a déjà existé dans les temps qui nous ont précédés. 11 Nul souvenir ne subsiste des anciens, de même de leurs plus récents successeurs il ne demeurera aucun souvenir chez ceux qui viendront plus tard. 12 

Moi, Kohélet, je suis devenu roi d'Israël, à Jérusalem. 13 Et j'ai pris à cœur d'étudier, d'examiner avec sagacité tout ce qui se passe sous le soleil: c'est une triste besogne que Dieu a offerte aux fils d'Adam pour s'en tracasser. 14 J'ai donc observé toutes les œuvres qui s'accomplissent sous le soleil: eh bien! Tout est vanité et pâture de vent. 15 Ce qui est tordu ne peut être redressé, et ce qui manque ne peut entrer en compte. 16 Je me suis dit en moi-même: "Voilà que j'ai, moi, accumulé et amassé plus de sagesse que tous ceux qui m'ont précédé à Jérusalem; mon cœur a acquis un grand fonds de discernement et d'expérience." 17 J'avais en effet appliqué mon attention à connaître la sagesse et à discerner la folie et la sottise, et je me suis aperçu que cela aussi était pâture de vent; 18 car, abondance de sagesse, abondance de chagrin, et accroître sa science, c'est accroître sa peine.

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L'idéologie des militants blooms est vide - est vanité en son essence.

Le fond le plus radical de l'idéologie est la vanité, le narcissisme et les mécanismes psychiques de protection de l'image de soi. Le récit héroïque du monde et de soi que véhicule l'idéologie est le produit d'un narcissisme qui dénie le réel pour exister selon un conte enchanté, où le petit-bourgeois misérable peut à son gré devenir un membre de l'Internationale qui fera le genre humain, un végétarien antifasciste qui libérera le peuple, ou un exemplaire du peuple Aryen ou Noir ou Grand Serbe ou peut importe mais de toute façon supérieur à tous les autres au nom d'une histoire évoquée, et décidant de qui a droit à la parole et à l'existence, et maître du bien et du mal. Cette prétention folle signe une farce de morale, un pécheur justifié. L'impuissance de l'homme à connaître le bien et le mal parmi les illusions du monde est reconnu du sage :

Voici encore ce que j'ai vu sous le soleil: dans l'enceinte de la justice domine l'iniquité; au siège du droit triomphe l'injustice. 17 Aussi me suis-je dit à moi-même: "Le juste et le méchant, c'est Dieu qui les jugera; car il a fixé un temps pour chaque chose et pour chaque action."

Le choix des idées est radicalement accidentel et indifférent. L'Islam radical a ses blooms comme le féminisme radical, le néofascisme comme tous les autres sectes idéologiques modernes. L'essentiel est la structure individuelle de forme partiellement schizophrénique, clivée du réel, qui se nourrit du récit idéologique pour poser un réel factice permettant la vie d'un ego grandiose également factice.

Exemple sur le site des Femen :

Des centaines de féministes se sont uni-e-s pour soutenir nos héroïnes: Amina, Pauline, Josephine et Marguerite, qui sont en prison pour avoir lutté en faveur des droits des femmes.
Le rassemblement a également vu s'exprimer l'oncle d'Amina, qui a prononcé un discours de soutien à sa nièce et aux interventions de FEMEN en Tunisie.
Aujourd'hui, jour du procès pour nos héroïnes, nous appelons tout le monde à s'unir pour nos droits, pour le féminisme, pour la liberté ; soyez prêt-e-s à vous battre. Pas de prison pour les féministes !

L'ego des héroïnes gonfle au monde entier, et permet de se battre pour la liberté, quand la première salariée venue ne se bat que pour une survie assez minable et sommaire, fort triste à regarder en face en vérité.

De tels profils psychologiques, au fond assez masochistes – travaillant à provoquer sur soi la violence comme l'avait noté Kaczynski – cherchent justement le martyre qui confirme leur construction égotique pseudo-héroïque. Ils peuvent tuer, ou chercher un mode spectaculaire, histrionique, comme les Pussy Riot, particulièrement à travers la prison et les tribunaux qui offrent des tribunes sublimes pour leurs fantasmes de sublime.

L'indigence politique flagrante de leurs actions, leur narcissisme évident – par exemple la photo et la vidéo comme mode de propagande privilégiés - leurs poses et leurs mines, s'ajoutant à leur absence de pensée effective, sont par contre des critères sur d'utilisation de la révolution comme thérapie pour une structure psychique profondément névrosée, née dans la toute puissance infantile nourrie par l'école – idéologues intégrés, délirants scolairement reconnus – ou dressée contre l'école – idéologues en rupture sociale comme les jeunes hommes islamistes ou fascistes.

La négation de la réalité est un critère essentiel. Ce déni est la racine de l'agressivité destructrice et de la haine de tous ces blooms, puisque la négation puritaine du réel oblige, pour être défendue, à aspirer à détruire tout ce qui s'oppose à la fausse réalité idéologique posée comme toute puissante, en miroir de la toute puissance fantasmée et immature de l'ego infantile. Cet ego infantile et jamais transformé est le fond de ce profil psychologique – et politique de fait - produit par la civilisation moderne.

Le déni comme la haine qu'il fonde peuvent prendre des formes très variées. Le déni peut amener à faire des faux : fausses accusations des antisémites et des chasseurs de sorcières, des Jacobins pendant la Terreur, des grands procès de l'URSS, des militants antifascistes vis à vis de leurs objets cristallisants, toutes issues du même principe. La haine peut aller d'une simple malveillance fondamentale à l'agression. Certains hurlent avec une haine spectaculaire, frappent et cassent, et d'autres tuent des enfants d'une balle à bout portant. Il y a là des degrés sur un continuum psychologique.

Plus les hommes sont éloignés de toute réalité, par la division du travail social et par l’immaturité qui les protège indéfiniment de tout ce qui est salissant, plus ils peuvent s'imaginer eux-même en des rêveries grandioses, et choisir leur genre, choisir leur vie, ou leur mort, choisir d'être – ce qui en réalité échappe résolument à l'être humain. La vie de tel jeune terroriste islamiste, ayant toujours eu de l'argent par ses proches et jamais travaillé, rejoint la vie de petites filles de la haute bourgeoisie pouvant sans travailler ouvrir un local dans le centre de Paris et voyager de part le monde en Barbie héroïne, un modèle qui dépasse l'attractivité du mannequinat sur le plan de l'auto-promotion et de la valorisation morale.

Ensuite j'ai réfléchi à cette prétention des hommes d'être l'objet des préférences de Dieu, et j'ai vu que, considérés en eux-mêmes, ils sont comme les animaux. (…) Car tout est vanité.

La Bhagavad-Gîtâ fait dire de même à son héros, un héros véritable, parlant à Dieu après avoir pris conscience de sa vacuité :

« J'ai cru que tu étais un ami et je t'ai appelé... ». J'ai cru, et c'était une erreur, une illusion née de l'ego. L'homme n'est pas Dieu, pas ami de Dieu, ni objet de sa préférence de cette manière.

Un révolutionnaire ne peut prétendre être un héros se vivant de pulsions issues de son cœur comme le premier bloom venu. Il sait qu'il a besoin de science, de réflexion, de recul. Plus que jamais, la lecture de Marx nous est salubre, ami. Salubre face à l'énorme obésité du discours spectaculaire de l'indignation et de la morale bourgeoise qui joue le spectacle de la pensée révolutionnaire depuis si longtemps.

Depuis maintenant deux siècle se joue la réalité de expropriation massive et répétée des hommes à leur langue, à leurs communautés, à leur sol, à leur richesse et au profit de leur travail. C'est le Capitalisme et l'Impérialisme qui plus que jamais dominent le monde, et l'idéologie – et même l'idéologie de gauche - plus que jamais qui domine le spectacle. On porte le drapeau rouge pour se solidariser in fine – de facto - avec le FMI ; on chante le chant des partisans pour défendre l'Union Européenne.

Marx l'avait annoncé : la Révolution revient comme Farce...la chute de la société de consommation apparaît de plus en plus comme analogue à un sévère lendemain de cuite – et les idéologies modernes sont les hallucinogènes de synthèse qui protègent les esprits faibles du réveil.

Vive Marx ! Vive la mort !


2 commentaires:

Anonyme a dit…

« C’est pourquoi le 1er devoir que nous impose la période présente est d’avoir assez de courage intellectuel pour nous demander si le terme de révolution est autre chose qu’un mot, s’il a un contenu précis, s’il n’est pas simplement un des nombreux mensonges qu’a suscité le régime capitaliste dans son essor et que la crise actuelle nous rend le service de dissiper. Cette question semble impie, à cause de tous les êtres nobles et purs qui ont tout sacrifié, y compris leur vie, à ce mot. Mais seuls des prêtres peuvent prétendre mesurer la valeur d’une idée à la quantité de sang qu’elle a fait répandre. Qui sait si les révolutionnaires n’ont pas versé leur sang aussi vainement que ces Grecs et ces Troyens du poète qui, dupés par une fausse apparence, se battirent dix ans autour de l’ombre d’Hélène ? réflexions sur les causes de la liberté et de l’oppression sociale de Simone Weil écrit en 1934

lancelot a dit…

Merci. Rien de ce que j'écris n'est nouveau.